Le Programme du droit de prêt public : mise au point

Chers membres de l’UNEQ,

Plusieurs d’entre vous ont écrit pour protester contre les modifications apportées au Programme du droit de prêt public (DPP), modifications résumées par l’UNEQ dans un article sur son site web — cliquez ici.

Pour dissiper tout malentendu, il faut d’abord établir les faits.

L’UNEQ n’a pas été directement consultée sur les décisions de la Commission du DPP (qui définit les modalités du Programme), nous n’avons été qu’informés des décisions prises par la Commission. Avec notre article, nous avons simplement voulu vous tenir au courant des changements en cours.

Le Programme du DPP est un dédommagement visant à compenser les pertes subies par les auteurs en lien avec la présence de leurs livres en bibliothèque. En effet, si les lecteurs empruntent les livres plutôt que de les acheter, cela fait moins d’argent dans les poches des écrivains. Cela dit, ce ne sont pas tous les livres qui donnent droit au DPP ; des critères d’admissibilité précis s’appliquent et, comme le souligne le Programme dans son site web, l’admissibilité d’un livre ne signifie pas que son auteur recevra automatiquement un paiement — pour en savoir plus, cliquez ici.

Pendant plus de 30 ans, il n’y a pas eu de limite de temps pour l’admissibilité des titres. Depuis cette année, la Commission du DPP impose une limite de 25 ans, en invoquant les raisons suivantes : il y a de plus en plus de nouveaux écrivains (800 nouveaux écrivains inscrits chaque année), de plus en plus de nouveaux titres (auxquels se sont ajoutés des titres numériques) et, bien que le budget du Programme ait été récemment bonifié, il n’est pas illimité. C’est pourquoi, chaque année, un même écrivain ne peut recevoir plus qu’un certain montant (un maximum de 3 552,50 $ en 2018, mais cette somme varie annuellement en fonction du budget et du nombre d’inscrits). Pour que les nouveaux auteurs obtiennent leur part du gâteau, la Commission se doit d’établir des limites. Notons par ailleurs que ce sont les ventes des œuvres nouvellement publiées qui sont plus susceptibles de diminuer en raison de leur disponibilité dans les bibliothèques.

Nous comprenons la déception vécue par les auteurs qui publient depuis plus de 25 ans et qui, désormais, verront potentiellement leurs dédommagements réduits. Vivre de sa plume au Québec est un défi, et chaque décision qui modifie les acquis des écrivains peut être perçue comme injuste.

Nous comprenons également la position du DPP, qui se doit d’indemniser davantage d’auteurs (qui sont plus nombreux qu’il y a 30 ans ; en 1986-1987, au début du Programme, 4 377 auteurs ont reçu un paiement, contre plus de 17 000 aujourd’hui).

Cela étant dit, nous déplorons que cette décision soit à effet immédiat. Il aurait été plus respectueux que la Commission informe à l’avance les auteurs des changements et laisse ainsi à chacun le temps de faire face aux conséquences sur sa rémunération.

De plus, nous interpellerons le gouvernement pour lui rappeler qu’il est de sa responsabilité d’assurer la pérennité et le développement d’un tel programme. Le Canada ne peut que se réjouir de voir grandir son nombre d’auteurs, preuve que le secteur culturel est dynamique. En revanche, il est indispensable d’ajuster le financement du DPP aux nouvelles réalités du milieu, et ainsi continuer de reconnaître le travail des auteurs qui contribuent au patrimoine culturel de notre pays depuis plusieurs décennies, tout en permettant l’indemnisation des nouveaux inscrits.
 

14 commentaires sur “Le Programme du droit de prêt public : mise au point

  1. Bertrand Gauthier

    Je crois que cette précision s’imposait et rétablit les faits et le rôle joué par l’UNEQ qui aurait dû être la première consultée quant aux modifications à apporter au programme. À cause de l’augmentation importante du budget, il aurait pu y avoir une progression du décroissant en ajoutant les catégories d’inscription 5 et 6 sans pour autant nuire aux nouveaux auteurs. Et comme l’UNEQ le note bien, il est déplorable que cette décision ait un effet immédiat. On aurait pu trouver une solution plus équitable afin, comme l’écrit si bien l’UNEQ, «de continuer à reconnaître le travail des auteurs qui contribuent au patrimoine culturel de notre pays depuis plusieurs décennies, tout en permettant l’indemnisation des nouveaux inscrits.»

  2. Robert Soulières

    L’Uneq écrit : «L’UNEQ n’a pas été directement consultée sur les décisions de la Commission du DPP (qui définit les modalités du Programme), nous n’avons été qu’informés des décisions prises par la Commission. »

    Ce qui est étonnant, car l’Uneq, si je me souviens bien, a un ou deux représentants à cette Commission… donc l’Uneq a été consultée !

    Bien d’accord aussi avec la proposition de Bertrand Gauthier qui mentionne qu’avec l’augmentation substantielle du budget (5 millions $ sur 2 ans), le DPP pourrait poursuivre la progression du décroissement en ajoutant deux nouvelles catégories, ce qui ferait en sorte que les plus vieux ouvrages seraient moins pénalisés et toujours éligibles et sans nuire aux ouvrages des nouveaux auteurs… La disparition des ouvrages antérieurs à 1993 est à tout le moins fort injuste.

  3. Doucet Bernard

    Comment s’effectue l’échantillonnage du DPP ?

    • UNEQ

      Dans le site web du Programme (http://droitdepretpublic.ca/a-propos/apercu-du-programme), on peut lire ceci :

      « Les paiements du DPP sont établis d’après le nombre d’occurrences d’un livre dans les catalogues de certains réseaux de bibliothèque.

      « Nous choisissons, dans différentes régions du Canada, des réseaux de bibliothèques publiques qui comptent une importante collection de livres. Nous sélectionnons sept réseaux de bibliothèques dans chaque groupe linguistique. Les livres bilingues ou rédigés dans d’autres langues que le français ou l’anglais sont recherchés dans les 14 catalogues de bibliothèque, mais le nombre d’occurrences pris en compte ne dépassera pas sept. Le nombre d’exemplaires trouvés dans chaque bibliothèque et le nombre d’emprunts d’un livre n’entrent pas dans le calcul.

      « Pendant de nombreuses années, la recherche se faisait manuellement, les bibliothécaires faisant le parallèle entre leur catalogue et la liste des livres inscrits. De nos jours, le personnel du DPP compare la liste des livres admissibles avec le catalogue en ligne de la bibliothèque ou sa copie numérique. À l’issue de la recherche, il connaît ainsi le nombre d’occurrences du livre. Seuls les créateurs qui ont droit à au moins 50 $ d’après cette recherche reçoivent un paiement. »

  4. Bernard Doucet

    Pourquoi certaines régions ne sont pas représentées dans l’échantillonnage? Ex.: Laurentides, Lanaudière.

  5. Bernard Doucet

    Comment choisit-on les bibliothèques qui feront partie de l’échantillonnage ?

  6. Elisabeth Vonarburg

    Tout à fait d’accord avec les remarques de Robert Soulières.

  7. Michel Dufour

    La limite de 25 ans est injuste et aussi discriminatoire puisqu’elle vise les auteurs vieillissants. Pour éviter que les chèques de nombreux membres de l’UNEQ ne rétrécissent comme peau de chagrin dans les prochaines années, je trouve que la suggestion de créer de nouvelles catégories d’inscription est excellente. L’UNEQ devrait en faire son cheval de bataille.

    • Bertrand Gauthier

      Entièrement d’accord avec Michel Dufour, c’est une belle occasion pour l’UNEQ de défendre très concrètement ses membres injustement pénalisés.

  8. Claire Gaucher

    À l’UNEQ de jouer maintenant en tenant compte des suggestions des intervenants. À l’UNEQ de protéger les acquis de ceux qui ont fait notre littérature.

  9. Lou Beauchesne

    En tant que jeune auteure, je tenais moi aussi à m’insurger contre ses nouvelles mesures. Et ce même si ces dernières ne m’affectent pas pour l’instant. Un jour, ce sera mon tour. Et qui sait si dans dix ou quinze ans la Commission du DPP ne décidera pas de modifier la règle du 25 ans en 20 ou 10 ans. D’ailleurs, pourquoi 25 ans? Ce choix me semble tout à fait arbitraire… L’UNEQ devrait en effet agir.

  10. Marie-Francine Hébert

    Le malaise que j’ai ressenti en lisant la lettre du DPP ne se dément pas. Même après la mise au point de l’UNEQ. Trop de questions restent en suspens.

    1- S’il est vrai que l’UNEQ n’a pas été «directement consultée», qui donc, plus au fait des besoins financiers des écrivains (plus âgés en particulier), l’a été ?
    2- Sur quoi est basée la limite d’admissibilité de 25 ans? Des actuaires se sont-ils penchés sur la question ?
    3- A-t-on évalué l’économie d’un décroissement prolongé sur 2 paliers ou plus?
    4- La durée du droit d’auteur est de 50 ans. Le DPP ne crée-t-il un dangereux précédent en réduisant à 25 ans la durée du droit de prêt public? Venant d’un programme gouvernemental de surcroit ?

    L’UNEQ a, ici, une occasion en or de défendre le droit d’auteur qui rétrécit comme peau de chagrin par les temps qui courent.

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