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La citation apocryphe attribuée à Voltaire : « Mentez, mentez, il en restera toujours quelque chose » illustre à merveille l’utilité du mensonge pour obtenir des gains, servir ses intérêts ou nier la réalité lorsqu’elle ne fait pas notre affaire. Sous l’ère « trumpienne », le mensonge a même pris du galon pour devenir un « fait alternatif ».
Avec le développement exponentiel des réseaux sociaux, même les mensonges les plus grossiers, répétés à satiété, finissent par avoir des allures de vérité, en dépit des faits. Nous en sommes les tristes témoins chaque jour dans de nombreux dossiers politiques.
Pourquoi cette entrée en matière sur le mensonge ? Pour une raison simple : depuis plusieurs mois, énormément d’informations erronées ont circulé et circulent encore sur les réseaux sociaux au sujet de l’UNEQ, créant, par conséquent, un contexte défavorable au débat et aux échanges.
Chères écrivaines, chers écrivains et artistes de la littérature,
Voilà près de six ans que je préside notre Union. C’est un honneur et un privilège que d’en être à mon troisième mandat et d’avoir été élue, puis désignée par mes pairs du conseil d’administration, pour piloter le seul syndicat d’artistes du domaine de la littérature au Québec. Et, comme tout honneur, celui-ci s’accompagne de grandes responsabilités : vous représenter, faire valoir vos droits et vos intérêts socioéconomiques, agir avec détermination dans le présent, avoir une vision de l’avenir, assurer la santé financière de notre Union, tout en vous tenant informé·e·s de tous ces enjeux aussi souvent et aussi clairement que possible.
C’est sans doute sur ce dernier point, l’information, qu’il me faut admettre que nos objectifs n’ont pas été atteints ces derniers mois.
Le premier geste des écrivaines et des écrivains québécois pour protéger leurs droits a été de fonder l’UNEQ en 1977, il y a 45 ans. Les objectifs de départ sont restés les mêmes aujourd’hui : représenter les écrivain·e·s, défendre leurs intérêts professionnels, moraux et économiques, et plus globalement travailler à la valorisation et à l’épanouissement de la littérature québécoise.
Depuis lors, l’UNEQ n’a cessé de se battre pour obtenir une loi sur le statut de l’artiste juste et équitable qui nous permettrait de négocier des ententes collectives encadrant les conditions minimales de pratique du métier d’écrivain·e, au même titre que les autres artistes.
Cette lutte semblait perdue d’avance, mais l’UNEQ a repris le flambeau il y a quatre ans et a mené une campagne tambour battant pour obtenir justice, ralliant un grand nombre d’autrices et d’auteurs ainsi que d’autres associations d’artistes.
Malgré tous les obstacles, l’UNEQ a eu gain de cause. Une nouvelle loi sur le statut de l’artiste a été adoptée le 3 juin 2022, propulsant notre syndicat dans une nouvelle ère. C’est une immense victoire, aussi inespérée qu’attendue. Et cette victoire implique de grands changements.
Comme le dit la chanson écrite par Stéphane Venne, c’est le début d’un temps nouveau pour les écrivaines et les écrivains. L’adoption à l’unanimité de la nouvelle loi sur le statut de l’artiste par l’Assemblée nationale, le 3 juin dernier, permet désormais à l’UNEQ de négocier avec les éditeurs et avec les autres partenaires de la chaîne du livre (salons du livre, bibliothèques, librairies, institutions scolaires, etc.) des ententes collectives prévoyant des conditions et normes de travail minimales dans les contrats.
Ce déplacement des plaques tectoniques changera profondément le rapport de force entre les autrices, les auteurs et les éditeurs. Auparavant, nous étions seuls face à l’éditeur, sans recours en cas de litige. Maintenant, nous disposons d’un réel pouvoir syndical, au même titre que les autres associations d’artistes.
Vous savez peut-être que Québecor a quitté l’Association nationale des éditeurs de livres (ANEL) récemment. Comme le prévoit la loi, l’UNEQ a donc envoyé par la poste un avis de négociation à l’ANEL, et un autre à Sogides (une filiale de Québecor), avec copie conforme au ministre de la Culture et des Communications. Nous avons reçu un accusé de réception de leur part.
Grâce à une écrivaine et un écrivain québécois, Amélie Dubé et Patrice Cazeault, la date du 12 août s’est inscrite comme un événement incontournable de la littérature d’ici.
Personne ne croyait possible l’adoption d'une nouvelle loi sur le statut de l’artiste avant la fin des travaux parlementaires tellement les délais étaient serrés. Les journalistes, qui pourtant y étaient plutôt favorables, nous prédisaient que le projet de loi mourrait au feuilleton. Malgré les doutes et le scepticisme ambiant, l’UNEQ et quelques associations d’artistes y croyaient dur comme fer.
Lorsque la loi a été finalement adoptée sur les chapeaux de roue, le 3 juin dernier, certains ont crié au miracle ou à la chance. Toutefois, cette victoire historique n’a rien d’un miracle et ne doit rien à la chance. Elle est le résultat d’une lutte acharnée de l’UNEQ pour faire reconnaître aux écrivaines et aux écrivains le même statut que pour les autres artistes. Le droit à la négociation d’ententes collectives. Le droit à un filet social. Le droit à des recours en cas de harcèlement psychologique ou sexuel, au même titre que les autres travailleurs. Le droit d’être des artistes à part entière.
Durant cette longue et dure bataille, nous avons eu le soutien précieux d’autres associations d’artistes. Mais nous n’y serions jamais parvenus sans la passion et la détermination de notre directeur général, Laurent Dubois. Avec sa formidable équipe, Laurent a soutenu le dossier de la révision à bout de bras, dans des conditions parfois pénibles, sans jamais compter les heures, et avec un sens remarquable du leadership.