Mot de la présidente — L’arbre qui cache la forêt

Grâce à une écrivaine et un écrivain québécois, Amélie Dubé et Patrice Cazeault, la date du 12 août s’est inscrite comme un événement incontournable de la littérature d’ici.

Tout a commencé le 12 août 2014, alors que cette autrice et cet auteur ont entrepris de façon indépendante une campagne d’achat de livres québécois, sans soutien de libraires ou d’associations de la chaîne du livre. Ce geste spontané a eu un succès foudroyant dès sa première édition et a conquis les cœurs des lectrices et des lecteurs dans les années qui ont suivi.

Je me réjouis grandement du succès extraordinaire de cette fête annuelle, qui a contribué à une hausse importante des ventes de titres québécois depuis sa création — cliquez ici pour en savoir plus sur les ventes dans les librairies indépendantes.

Suzanne Aubry (Photo : Audrée Wilhelmy)
Toutefois, il faut rappeler qu’une seule date, aussi bénéfique soit-elle, n’a pas le pouvoir de solutionner comme par miracle la précarité de la condition socioéconomique des écrivaines et des écrivains. Il ne faut pas voir uniquement l’arbre qui cache la forêt.

Et cette précarité n’est pas seulement causée par les faibles revenus tirés par les auteurs et autrices de leurs activités littéraires – en 2017, le revenu médian tiré du travail d’écriture était de 3 000 $ –, mais par les pratiques contractuelles souvent injustes encadrant ce travail. J’en donne à titre d’exemples les cessions illimitées du droit d’auteur, un droit de préférence abusif, ou encore des redditions de compte sur les redevances devant être perçues par les écrivain·e·s vagues, incomplètes ou tout simplement inexistantes…

La nouvelle loi sur le statut de l’artiste : un changement de paradigme

Dans mon Mot de la présidente du 12 août de l’année dernière, je réitérais la nécessité pour notre Union d’obtenir une réforme complète de l’ancienne loi sur le statut de l’artiste : « Les écrivaines et les écrivains sont les seuls artistes à ne pas avoir d’entente collective pour encadrer les contrats d’édition, ce qui a pour résultat des clauses abusives et un total déséquilibre du pouvoir qui se perpétue depuis plus de 30 ans. »

Grâce à une campagne intensive de l’UNEQ et au soutien indéfectible de nos membres et d’autres associations d’artistes, ce qui était considéré comme une mission impossible s’est produit : nous avons obtenu le 3 juin 2022 une nouvelle loi sur le statut de l’artiste, qui nous permet enfin de négocier des ententes collectives avec les éditeurs et nos autres partenaires de la chaîne du livre.

Ce gain historique nous confère cependant des devoirs incontournables. Nous devons nous préparer rapidement afin d’établir un cahier des charges des négociations à venir. Nous consulterons nos membres dans un premier temps afin de les entendre sur leurs besoins. Nous avons d’ores et déjà engagé deux avocates spécialisées en droit d’auteur et en droit du travail, afin de nous permettre d’entreprendre ces négociations dès que possible. Nous aurons besoin de ressources financières importantes pour y parvenir.

Je suis plus qu’optimiste sur l’avenir qui s’ouvre à nous. Mais je ne vous cacherai pas que nous avons beaucoup de pain sur la planche. Nous devons continuer à démontrer notre solidarité et notre détermination. Nous avons maintenant les outils en main pour forger notre avenir.

Votre présidente,

Suzanne Aubry
 

  1. Lise Tapp

    Cette nouvelle est ressentie comme un vent de fraicheur, il était temps que les choses bougent. Auteure depuis toujours, mais publiée depuis 2018 à l’âge de 71 ans, pour un premier roman, le second l’année suivante. Le troisième prêt au printemps 2020,n’a pas vu le jour encore. L’éditeur suppose octobre ou novembre 2022. Une attente bien trop longue depuis 2020. Mais des conjonctures rédhibitoires nous ont menés jusque là.
    Un contrat signé, une date devrait être mentionnée sur le dit contrat pour la publication dans l’année. Une chose intéressante à voir, si ce n’est pas déjà fait.

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